Etienne Gille, Vice-Président d’AFRANE, a été interrogé il y a quelques jours par le journal La Croix. Ses propos, ainsi que ceux de Florian Seriex, porte-parole du CICR, ont été publiés le 30 août 2021.
Nous nous permettons de partager ici les réflexions et les interrogations d’Etienne Gille.
Étienne Gille, vice-président et cofondateur de l’ONG Amitié franco afghane (Afrane)
« Afrane travaille dans le domaine de l’éducation en Afghanistan. Nous étions en relation avec 48 établissements scolaires dans quatre provinces, et nous avions mis en place un système de formation des instituteurs à une pédagogie active en nous appuyant sur des Afghans que nous avions nous-mêmes formés. Cela nous permettait de décupler notre action. Nous étions présents dans des régions plus ou moins calmes et n’avions pas de relations avec les talibans, contrairement à d’autres ONG qui se trouvaient dans des zones plus difficiles.
On ne peut pas dire exactement que nous avons suspendu nos activités parce que nous avons toujours du personnel en Afghanistan, du personnel afghan qui continue à aller de manière irrégulière dans nos bureaux. Mais nous n’avons pas de réelle activité pour le moment, sachant que les écoles étaient de toute façon fermées. Une partie de nos salariés locaux a été évacuée en juillet et nos deux employés français ne sont plus sur place. L’un était en congé et n’est pas retourné en Afghanistan et l’autre a pu quitter Kaboul le 15 août.
Nous allons voir maintenant ce qu’il est possible de faire. Il y a une problématique liée à la situation sécuritaire, qui évolue de jour en jour comme on l’a vu avec les événements récents à Kaboul. Mais nous faisons surtout face à un problème d’autorisations et à un problème moral. Est-ce que les talibans vont être intéressés par une ONG qui travaille dans le domaine de l’éducation ? Qu’est-ce que nous allons pouvoir faire dans des écoles qui seraient contrôlées idéologiquement par les talibans ? Est-ce qu’un expatrié pourra retourner en Afghanistan ou pas ?
Nous restons dans la logique de vouloir aider l’Afghanistan, nous ne l’abandonnons pas. Mais il faut vraiment que nous réfléchissions et que nous interrogions tous nos partenaires pour savoir quelle est l’attitude la plus convenable pour continuer à aider le peuple afghan. Autrement dit, nous aurons une action, mais nous ne savons pas encore laquelle. Dans un premier temps, l’important pour nous est de garder le contact avec les chefs d’établissements, de voir s’ils sont changés ou pas, si les professeurs retournent dans les écoles…
Nous ne limiterons pas obligatoirement notre action à l’éducation. En fonction des besoins qui apparaîtront, nous essaierons d’y répondre aux mieux. Notre première attitude sera d’être à l’écoute de ces besoins et des possibilités d’action. Ce n’est pas nous qui allons définir ce que nous allons faire. La problématique n’est pas tout à fait la même pour des ONG travaillant dans le domaine médical. Pour le moment, il semble que les talibans soient demandeurs de leur aide, même s’il n’est pas impossible que, progressivement, ils veuillent instaurer des règles qui ne seraient pas acceptables par elles ».
Vous pouvez retrouver l’article complet sur le site de La Croix.