Editorial du N° 177

Que faire pour la paix ?

L’insécurité a nettement diminué en Afghanistan. Et pour cause ! Les talibans, principaux responsables de l’insécurité, sont à présent au pouvoir et ne commettent donc plus d’attentats ou d’exécutions sommaires. Certes Daech continue d’être présent et de viser mosquées et cibles civiles. Mais la vie à Kaboul peut apparaître comme paisible, on y circule sans beaucoup de contrôles, et même les femmes, bravant les pressions, sortent sans revêtir la diabolique burqa, du moins dans le centre-ville. On peut aussi emprunter sans crainte la route qui mène à Bâmyân, chose devenue inimaginable ces dernières années. C‘est ce dont témoignent le chef de mission d’AFRANE et deux adhérentes d’AFRANE qui viennent de se rendre dans différentes régions d’Afghanistan.

Bref, les talibans tiennent le pays.

Mais est-ce pour autant la paix ? Des chiffres donnent le tournis. D’après le Bulletin du CEREDAF(n°406) citant l’agence Khaama (du 5 avril) et un sondage Gallup, 53 % de la population afghane voudrait s’exiler. 89 % des Afghans estiment que leur situation économique s’aggrave alors que seulement 1 % répond positivement. 75 % de la population ne trouve pas suffisamment de nourriture. On ne peut pas être sûr de l’exactitude de ces chiffres, mais ils correspondent aux retours qu’on peut avoir de la situation.

Est-ce cela la paix ?

AFRANE avait développé toutes ces dernières années dans les écoles où elle intervenait un « projet paix » avec des journées Paix, des livrets ouvrant les élèves à des attitudes non violentes ou proposant aux professeurs une gestion non-violente de la classe. Il s’agissait de faire grandir les élèves dans des attitudes de compréhension mutuelle, d’acceptation des différences, de rejet de la violence, en s’appuyant sur des grands textes de la culture afghane. Tout cela est-il obsolète ?

Je me permets de vous solliciter, amis lecteurs : accepteriez-vous de prendre quelques minutes, de rentrer en vous-mêmes pour réfléchir à cette question : qu’est-ce qu’une petite ONG comme AFRANE peut faire pour la paix en Afghanistan ? La question peut paraitre présomptueuse, mais elle nous presse. Et qu’est-ce qu’oeuvrer pour la paix aujourd’hui dans un contexte d’oppression ? Vos éventuelles contributions nous aideront à approfondir notre réflexion.

Pour l’heure, AFRANE poursuivra et développera son aide humanitaire (on verra en pages intérieures une description de ce que nous avons pu faire dans ce domaine). Peut-être est-ce d’abord cela, travailler pour la paix.

Etienne GILLE

16 juin 2022

PS : en page de couverture, quelle désolation cette photo de professeurs réduits à faire la queue pour recevoir un sac de farine !

 

Sommaire du N°177

Actualité

Faits et ressentis : témoignages

Qu’est-ce qui se passe à Hérat ?
Propos recueillis par Zaher DIVANTCHEGUI
Hérat est la ville phare de l’ouest afghan. Célèbre par son passé à l’époque timouride, elle a gardé l’image d’une ville de haut niveau culturel. Zaher Divantchegui a recueilli le témoignage d’une militante de la société civile qui compare la vie dans la cité hier et aujourd’hui. Hélas tous les indicateurs sont au rouge.
La lecture de cet article vous est offerte en ligne.

Y-a-il une lutte de pouvoir parmi les factions des talibans ?
par Torek FARHADI
Depuis longtemps on sait qu’il y a des divergences au sein des talibans. Elles expliquent en partie les tergiversations et une forme d’immobilisme d’un régime par ailleurs bien opaque. Torek Farhadi nous donne quelques éléments de compréhension à ce sujet.

Aide humanitaire

Distribution alimentaire à Tcharikar et à Kaboul
par Simon CANNONE
AFRANE a effectué des distributions d’aide en nature à Tcharikar et dans le sud de Kaboul en mars et avril dernier. Les difficultés administratives ont été grandes mais les distributions se sont déroulées sans problèmes, et les professeurs bénéficiaires ont manifesté beaucoup de gratitude. Ces distributions ont été aussi pour AFRANE l’occasion de renouer avec les écoles de son réseau et de mieux percevoir les ressentis de la population

Agriculture

Les kârez en Afghanistan
par Alain MARIGO
Dans un pays où la pluviosité est limitée à l’hiver et au printemps capter l’eau présente en sous-sol est capital. Avec ingéniosité et un grand savoir faire, les paysans afghans ont mis au point le système des kârez

Histoire

Regards sur l’Afghanistan en 1955
synthèse de Vincent SCHNEITER
En 1955, des étudiants britanniques venus en Afghanistan de Londres en Land-Rover étudient la vie administrative et économique dans la province du Badakhchan (où ils croisent l’aventurier-écrivain Fournier-Aubry) et décrivent la vie des expatriés occidentaux à Kaboul. Vincent Schneiter fait pour nous une synthèse de leur récit. Un certain nombre des problématiques évoquées sont toujours d’actualité.

En France

Une semaine marquante dans un établissement scolaire
par l’équipe pédagogique de l’EIM-FP
Quand on parle de l’Afghanistan à une classe ou à un groupe d’élèves, on peut s’attendre à être confronté à un certain nombre de clichés, mais souvent aussi les élèves font preuve de curiosité et un véritable intérêt, susceptible de se transformer en solidarité, peut survenir. C‘est une belle expérience, certainement mémorable, qu’a ainsi vécue un groupe d’élèves de la région de Nantes.

Un thé vert avec

A Saint-Malo, avec de fidèles et « étonnants voyageurs » en Afghanistan
par Régis KOETSCHET
Le festival des « Étonnants Voyageurs » s’est tenu à Saint Malo du 4 au 6 juin. Occasion pour Régis Koetschet de rencontrer de nombreux auteurs entrés en sympathie avec l’Afghanistan et sensibles à sa situation actuelle.

 Dernières nouvelles

Chronologie
Brèves
Mémoire : Wali Nouri, Gérard Fussman
Dernières publications
Notes de lecture

Le cri des femmes afghanes

Dans l’anthologie des poétesses afghanes établie par Leili Anvar et dont Régis Koetschet fait la recension dans les pages intérieures, nous avons choisi pour vous, avec l’aimable autorisation de l’éditeur, un poème de Nâdia Anjuman.

 

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