Couverture du N°172 des Nouvelles d’Afghanistan, mars 2021

 

Le 19 avril l’ambassadeur de France a informé AFRANE de ses inquiétudes concernant la situation en Afghanistan du fait du retrait des forces américaines d’Afghanistan. Il s’attendait à une dégradation très rapide de la situation à partir du 1er mai (date prévue initialement pour le retrait complet des forces américaines) et avait décidé d’attribuer à tout son personnel des visas pour la France dans la perspective d’un asile humanitaire. Il avait par ailleurs obtenu du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères que soit également accordé un visa aux personnels afghans d’AFRANE. Il est apparu ultérieurement que le visa avait aussi été offert à tous les employés de l’IFA (Institut français d’Afghanistan) et aux professeurs de français des lycées Esteqlâl et Malalaï et des départements de français des Universités de Kaboul, de Tcharikar, de Bamyan et de Hérat.

Les responsables d’AFRANE, après consultation du Conseil d’Administration, ont estimé que les craintes exprimées étaient sans doute excessives et que le danger n’était pas imminent. Ils ont pensé en outre que la décision de l’ambassade, apparemment non concertée avec les autres ambassades était un très mauvais signal pour ceux qui recherchent un accord politique, ainsi que pour la population afghane qui risquait d’y voir un abandon de la part de ses amis de toujours.

Il s’est trouvé que cette analyse était partagée par tous les membres du COFA (Coordination des ONG françaises en Afghanistan). Ceux-ci ont alors décidé d’écrire une lettre au ministre de l’Europe et des Affaires étrangères pour lui faire part de leur émotion, lui communiquer leur propre analyse et lui demander un rendez-vous. Cette lettre mise au point collectivement a été portée au Quai d’Orsay le 3 mai et est restée à ce jour sans réponse. Les ONG n’ont pas souhaité jusqu’à aujourd’hui rendre publique la démarche. Cependant, le journal Le Monde en a eu connaissance et a publié dans son édition du 16 mai un article de Jacques Follorou qui vient de passer quelques jours à Kaboul et décrit clairement la situation.

Parallèlement, AFRANE a pensé qu’elle ne pouvait pas laisser son personnel dans l’ignorance de la possibilité qui lui était offerte. Fort inquiets de la situation et des incertitudes quant à l’avenir de l’Afghanistan, et pressés de répondre à une offre faite « maintenant ou jamais plus » la majorité des membres du personnel d’AFRANE a choisi de demander l’asile. L’action d’AFRANE en Afghanistan est ainsi mise en péril, même si AFRANE est résolue à poursuivre son travail en faveur de la population afghane. Il est important à ce sujet de souligner que le personnel afghan d’AFRANE, de même que celui des autres ONG françaises, ne travaille pas pour la France mais bien pour son propre pays. Jamais AFRANE n’a développé un projet qui n’ait son origine dans une demande afghane et qui n’ait été concerté avec les autorités éducatives du pays.

Fidèle à l’amitié franco-afghane, AFRANE a pour seuls désirs que la paix revienne en Afghanistan et que la France jamais n’abandonne sa population. Pour cela AFRANE souhaite vivement que toute mesure précipitée et non concertée soit suspendue et qu’au contraire des signaux positifs soient envoyés à tous ceux en Afghanistan qui cherchent une solution pacifique ou y apportent une aide humanitaire.

Edit du 30/06/2021: Etienne Gille, vice-président d’AFRANE, a été interrogé par France 24. Vous pouvez retrouver cet article en suivant ce lien: « Afghanistan, les ONG poursuivent leurs activités malgré une situation sécuritaire inquiétante« .

Edit du 06/07/2021: Retrouvez une intervention d’Etienne Gille sur France 24. « Offensive des Taliban en Afghanistan : la stratégie française en question« .